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EXTRAIT DE "DE QUOI TENIR DIX JOURS"

Bien.


Il est grand temps de faire un petit inventaire, sinon je vais encore oublier plein de trucs et après, je vais encore me plaindre. Je suis même capable de m’engueuler moi-même, au risque de finir par me faire la tête pendant des jours. Je suis parfois très rancunier. Du coup, je refuserai de faire le premier pas, ce qui entraînera une rupture irréversible de la communication. Je vais me mettre à pleurer, j’ai oublié de prendre des mouchoirs, je vais manger pour compenser, je vais grossir et comme j’aurai tout mangé, je vais mourir de faim.


Tout ça la faute à qui ? Je vous le demande... à moi. Du coup, bonjour la dépression. Je risque de me suicider, de pourrir, d’infecter la cabane, puis la forêt et pour finir, de causer une apocalypse zombie à l’échelle planétaire. Je ne sais pas pour vous, mais moi, je ne souhaite pas être responsable d’une telle catastrophe. Sinon, je risque de m’engueuler moi-même et... pardon, je me répète. Je divague. Enfin, je ne dis pas « vague ». Pardon, je n’ai pas pu résister. De quoi parlait-on, au fait ? Ah oui, l’inventaire.


Il faudra que je pense à emporter mon réchaud et une petite bouteille de gaz de rechange au cas où la première se viderait plus vite que prévu. Je ne tiens pas à manger froid pendant dix jours. On n’en meurt pas, mais ça ne donne pas le sourire. Du coup, je vais tâcher de ne pas oublier les allumettes. Je vais prendre une... non, deux petites boîtes. On ne sait jamais. Qu’est-ce que je vais me faire à manger ? On va dire qu’une boîte de quatre-cents grammes par repas fera l’affaire, donc je vais emporter cinq boîtes de petit salé aux lentilles, une valeur sûre et cinq boîtes de ravioli. Avec ça, je vais mettre cinq boîtes de cassoulet, deuxième valeur sûre. Il faut des légumes, aussi. On va dire que cinq boîtes de petits pois carottes seront parfaites pour le job. Pour le grignotage, condition essentielle à la survie d’un être humain, les munitions seront composées de cinq pommes et de cinq petits paquets de chips. En alternant, cela fait un aliment de chaque sorte tous les deux jours. Évidemment, il va me falloir de l’eau. On va partir sur dix bouteilles d’un litre et demi. Je me réserve quand même une bière par jour, il ne faut pas déconner.


Donc, dix bières, c’est noté. On va tabler sur un rouleau de papier toilette par jour. Si je ne chope pas la gastro, ça devrait largement suffire. J’ai mis dans mon petit sac deux carnets et cinq crayons de bois, histoire de pouvoir noter mes impressions pendant ces petites vacances. La lampe torche est chargée en piles. Il y a des lampes, là-bas, mais on n’est pas à l’abri d’une panne. Pour l’hygiène, je vais prendre deux savonnettes, un gant et une serviette de toilette. Ça ira bien pour dix jours. J’ai bien chargé la batterie de ma visseuse, mais je vois là que j’ai oublié de mettre mon jeu de cartes et mes cinq dés dans le sac. C’est chose faite. Un peu de lecture s’impose, car les soirées seront peut-être un peu longues. Un destin de trouveur fera très bien l’affaire. Cette bande dessinée de Gess a l’air vraiment sympa. Une amie m’a offert ce livre qui raconte une belle histoire se déroulant dans le Paris de fin 1800. Mon duvet pour le chaud, mon matelas pour le dos... tout ça tombe sous le sens. Oh putain ! Les couverts. J’ai bien failli passer dix jours à manger avec les doigts. Une fourchette, un couteau et une cuillère à soupe. Voilà. Un verre en plastique sera très suffisant. Je pense même que je vais boire à la bouteille, mais bon. On prend quand même.


Bon, eh bien je crois que j’ai fait le tour. Je vais valider cette liste.


Ça, c’est fait.

Extrait de Dequoitenir10jours: À propos
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